Agent spécial

L’affaire se présentait bien. S’il m’est arrivé de maudire ce métier éreintant, je me sentais aujourd’hui dans une forme éblouissante. Et pourtant, dans le train qui m’avait amené à Nice, la veille, je n’avais cessé de sacrer après « Bébé ».« Bébé », c’est le surnom que nous donnons entre nous au vieux, curieusement dénommé Baptiste Biroutin. Comment peut-on à la fois être porteur d’un nom aussi ridicule, et détenir ces écrasantes responsabilités qui font de lui le grand patron du contre-espionnage français ? C’est une chose que l’on ne commence à comprendre que lorsque l’on a fait la connaissance de Bébé. Et comme Bébé ne supporte d’être connu que par ceux auxquels il a quelque mission à confier, force vous est de subir la loi de cet étrange bonhomme, de vous plier à ses extravagances, et de sauter dans le Mistral le jour précisément où vous aviez projeté de consacrer vos loisirs à votre petite amie (ou à une de ses copines, si vous êtes assez mufle pour ça).